Jacqueline, mon épouse, est femme unique au milieu de trois hommes, nos deux fils et moi. Dès que nos enfants ont atteint l’âge de raison, les discussions dans la maison, en particulier lorsque nous étions à table, sont devenues très animées. Pour être exact, nous étions cinq, avec ma belle-mère. Si cette dernière s’impliquait dans tous les aspects de notre vie familiale, je ne la compte pas dans ce récit, car elle n’apportait jamais son grain de sel à nos « balivernes ». J’ai su par la suite qu’elle ne faisait que réserver ses jugements pour pouvoir mieux me poignarder dans le dos par la suite en me contredisant auprès de mes enfants. N’allez pas penser que je l’ai moins aimée après cette découverte; de fait, vingt années après sa mort, je l’aime toujours autant pour tout l’amour et tous les soins qu’elle a prodigués à mes enfants.
Quoi qu’il en soit, mes enfants et moi, sans être toujours en accord, faisions toujours preuve d’esprit de géométrie, poursuivant la vérité au moyen d’un enchaînement cohérent de nos idées. Cela me satisfaisait parce que pour moi la cohérence importait plus que la vérité.
Il se trouve que ma femme avait toujours ou presque une opinion qui était aux antipodes des nôtres, mais qu’elle avait toujours du mal à défendre au moyen d’une argumentation logique. Aussi finissait-elle toujours ou presque par quitter la table avec fracas, en vociférant que nos enfants et moi always gang up on her. De sorte que, nos repas ensemble, toujours si bien agrémentés au départ par sa présence, car ma femme est une personne intéressante, si mes enfants sont d’agréables convives, se terminaient immanquablement en queue de poisson.
Or, même s’il me revenait de maintenir l’ordre dans ma maison et d’encourager des relations respectueuses entre nos enfants et nous, je ne pouvais en toute conscience les empêcher de faire la distinction de ce qui est logique et ce qui ne l’est pas. Pour cette raison, j’avais l’air d’encourager de leur part ce qui était aux yeux de leur mère des insolences caractérisées.
Un jour, notre fils aîné, à la suite d’une discussion animée, a fait, en présence de sa mère, bien entendu, car mes enfants n’avaient pas l’habitude de parler dans le dos des gens, une déclaration qui m’a laissé abasourdi. Il a dit : « Cessons de demander à maman d’être logique. Car avec ses forces (entendre sa force physique et sa force morale) et sa vivacité d’esprit, si elle devait avoir la logique en plus, toi papi, Marc et moi ne serions plus rien. »
Ce que mon fils a voulu dire est que, contrairement à nous, sa mère avait l’esprit de finesse et qu’à ce titre elle n’avait pas besoin comme nous d’une longue chaîne de raisonnement (l’esprit de géométrie) pour arriver à la vérité; elle en avait une connaissance immédiate imputable à sa capacité de la sentir.
Friday, April 1, 2011
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